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CENTIF Bénin : au cœur de la bataille pour l’intégrité financière

CENTIF Bénin

Il y a dix-neuf ans, la mise en place de la Cellule nationale de traitement des informations financières (CENTIF) ne relevait pas d’un luxe administratif, mais d’un impératif stratégique. En 2006, le Bénin s’alignait sur les standards internationaux en matière de lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme, s’inscrivant ainsi dans une dynamique régionale initiée par l’UEMOA. Depuis, le chemin parcouru mérite plus qu’une reconnaissance de principe : il symbolise l’effort discret mais décisif d’un État pour protéger les fondations mêmes de son économie.

Dans un contexte mondial où l’argent sale se déplace à la vitesse de la lumière à travers les circuits financiers, où les flux criminels menacent la stabilité des États, la CENTIF représente l’œil vigilant de la République. Son rôle ? Collecter, analyser, enrichir et diffuser des renseignements financiers. Une mission sensible, souvent mal comprise par une partie de l’opinion, qui y voit parfois un outil d’espionnage économique. À tort.

La transparence financière n’est pas une option

Comme l’a rappelé le président de la CENTIF, Abdou Rafiou Bello, dans une interview accordée au quotidien Le Matinal, il ne s’agit nullement de “traquer” ou “surveiller” les citoyens honnêtes. La CENTIF n’est pas un gendarme tapi dans l’ombre, mais un filtre républicain, un instrument de salubrité publique qui permet de faire échec à l’intrusion des fonds illicites dans l’économie réelle. Car lorsqu’un pays est stigmatisé pour la porosité de son système financier, les conséquences sont immédiates : retrait des investisseurs, isolement bancaire, flambée des coûts de transaction, raréfaction des biens importés… et in fine, paupérisation de la population.

C’est pourquoi l’action de la CENTIF doit être comprise comme une mesure de protection collective. Le blanchiment de capitaux n’est pas qu’un crime en col blanc : c’est une menace contre l’accès aux ressources de base, contre l’équité devant l’impôt, contre la crédibilité des institutions.

Une montée en puissance graduelle

Depuis sa création, la CENTIF a connu trois grandes phases : la sensibilisation et la formation des acteurs, la mise en conformité de la place financière béninoise aux standards internationaux, et aujourd’hui, la phase de modernisation et d’efficacité. Les chiffres parlent d’eux-mêmes : entre 2019 et 2024, plus de 1600 dossiers traités, dont une centaine transmis au Procureur spécial de la CRIET, et des collaborations fructueuses avec la Direction générale des impôts ayant permis de recouvrer près de 4,9 milliards de francs CFA. Ce sont autant de ressources sauvées des griffes de l’évasion fiscale.

Mais au-delà des statistiques, c’est une logique de prévention et de dissuasion qui se construit. Grâce à des accords stratégiques (le dernier en date avec Bénin Contrôl) la CENTIF affine sa capacité à détecter les anomalies aux frontières, dans les flux douaniers ou les mouvements d’argent suspects.

Une dynamique portée par l’État, soutenue par les partenaires

Depuis sa prise de fonction en juillet 2024, Abdou Rafiou Bello inscrit sa démarche dans la continuité mais avec une vision renouvelée : faire de la CENTIF un pôle d’excellence dans le traitement du renseignement financier à l’ère du numérique. Grâce à l’interconnexion avec les bases de données nationales (fiscales, douanières, judiciaires…), et à un effort soutenu de digitalisation, la cellule entend accroître sa réactivité et sa précision.

Un pari rendu possible par le soutien constant du Gouvernement béninois, à travers un cadre juridique régulièrement actualisé (la dernière loi datant de février 2024) mais aussi par l’appui des partenaires techniques comme la GIZ, Expertise France, le FMI ou la Banque Mondiale.

L’enjeu est international, la réponse doit être collective

La CENTIF n’est pas seule. Elle fait partie d’un réseau global (le Groupe Egmont) qui réunit 177 cellules de renseignement financier à travers le monde. Cette appartenance permet des échanges d’informations cruciaux dans un monde où les délits financiers ne connaissent pas de frontières. L’efficacité de cette coopération dépend cependant du respect rigoureux des principes de confidentialité, d’indépendance et de sécurité de l’information.

Faire corps avec l’État de droit

La lutte contre le blanchiment des capitaux ne saurait être une chasse aux sorcières. C’est une composante essentielle de la bonne gouvernance. Elle repose sur un pacte de confiance entre l’État, ses institutions et les citoyens. Il ne s’agit pas de faire peur, mais de faire bloc. Car un pays dont les circuits financiers sont sains est un pays capable de bâtir un développement équitable et durable.

À l’heure où les flux financiers illicites rivalisent d’ingéniosité pour se fondre dans la légalité apparente, la CENTIF est l’un des derniers remparts. Elle mérite d’être connue, comprise et soutenue. Non pas pour ce qu’elle traque, mais pour ce qu’elle protège.

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